Chroniques de la Première Guerre Karmique : les Gardiens de l’Épouvante



Il n’existe à cette heure aucune transcription écrite, autre que la tradition orale bien connue de tous, qui fasse état des évènements relatifs aux Gardiens de l’Épouvante. Leur organisation, leur puissance et même leur nature demeure ainsi un mystère. Il est temps de révéler la Vérité, transmise de bouche à oreille depuis ces temps anciens, et maintenant consignée sur la Table de Pierre du Temple de Niue par celui qui relèvera cet Ordre déchu de la poussière, dans le but d’accomplir la seule volonté louable de l’Unique.

Chronologie des évènements

-346000 : Naissance de Niue et Quen.
-177000 : Début de la Première Guerre Karmique
-120000 : Niue construit son temple à proximité de la ville d’Ahsgäar, au nord de la Baie Sombre.
-115000 : Apogée d’Ashgäar, Niue quitte son temple sous une forme déguisée pour subtiliser audacieusement l’essence des six Primaires.
-115500 : Niue mélange l’essence des six Primaires pour créer une armée. Constitution du Code Antique sur la Table de Pierre et organisation de l’Ordre. Début de la guerre entre le Temple et Ashgäar.
-110000 : Ashgäar n’est plus que ruines. Les Orcs abandonnent définitivement l’endroit. L’Armée de Niue prend le nom de Sentinelles de Niue et veille sur le Temple. Niue se retire dans le Saint des Saints du Temple.
-90100 (date estimée) : Schisme des Sentinelles. Niue sort du Saint des Saints, fusionne les esprits des Sentinelles tombées au combat avec ceux des survivants. Cette nouvelle manipulation rend les membres de l’Ordre (qui ne compte plus qu’une vingtaine de membres) plus instables et plus fanatiques encore. Niue s’assure ainsi leur servilité à jamais.
-90000 : Avènement des Gardiens de l’Épouvante, nouveau nom des Gardiens. Début de la Marche Funeste des Gardiens sur la Terre des Éléments.
-89990 : Défaite des Orcs face aux Gardiens à Mor’Frey, au pied des Montagnes Furieuses. La ville est entièrement détruite.
-89975 : Ravages sur le territoire des Elfes qui sont décimés par les Gardiens.
-89950 : Éradication des Hommes lors de la Bataille des Mines.
-89900 : Bataille du carrefour de Tael Loth. Summum de la puissance des Gardiens.
-89600 : Intervention et défaite de Fimine face aux Gardiens.
-89500 : Intervention et défaite de Posicillon face aux Gardiens.
-89400 : Intervention et défaite de Vulfume face aux Gardiens.
-89300 : Intervention et défaite d’Eolia face aux Gardiens.
-88000 : Eradication des Gardiens de l’Épouvante par les Dieux Élementaires, grâce à Quen et à l’Armée des Quatre. Séparation des esprits les plus puissants des Gardiens en une multitude de fragments.

Chapitre Premier : le Temple de Niue

La Première Guerre Karmique trouve son origine dans les affrontements entre les quatre Dieux Élémentaires, soucieux de créer des œuvres vivantes toujours plus puissantes, toujours plus résistantes pour surpasser les autres Dieux Élémentaires. L’Unique, quand il vit comment ses créations s’entredéchiraient, créa une entité à partir de sa Nature même, chargée de mettre un terme à ce conflit. Malheureusement, cette entité fut bien vite, elle aussi, déchirée entre deux choix, et se sépara en deux, chacun de ses côtés représentant l’un de ses choix. Quen et Niue virent ainsi le jour, et alors que le premier avait la mission de rassembler les éléments en guerre afin d’accomplir le souhait de l’Unique, le deuxième œuvrait afin de réduire tout ce qui existait à néant, pour pouvoir reconstruire sur des bases plus saines.

Quen, le premier, rencontra les Dieux Élémentaires, leur offrant son aide et ses conseils judicieux. Toutefois, pour les Dieux, il était déjà tout bonnement impossible de s’entendre entre eux, ce n’était pas pour s’entendre dicter leur conduite par une entité quelconque, fut-elle issue de l’Unique. Niue, averti des échecs répétés de son opposé, et doté d’une nature différente de Quen, préféra œuvrer en secret, préparant ainsi un plan complexe pour se débarrasser à la fois de Quen, gênant car doté des mêmes pouvoirs que lui, et des Dieux Élémentaires, jugés indignes de représenter l’Unique selon Niue. Ce dernier se recula ainsi dans une contrée lointaine, et bâtit son Temple sur un emplacement qu’il estimait comme le plus propice à cacher ses manigances, à proximité de la ville d’Ahsgäar, au nord de la Baie Sombre actuelle, enclavée dans les montagnes de Vulfuminius.

La ville d’Ashgäar était alors bien connue. Elle n’était pas loin de la mer, et proche du même coup de l’archipel de Sowah. La ville était alors peuplée par des Orcs qui avaient quitté le territoire de leur race aux premiers temps de l’existence de cette dernière pour franchir les premiers renforts rocheux de Vulfuminius. Or, les Orcs sont, comme chacun le sait, de grands navigateurs, si bien qu’ils ne mirent guère longtemps avant de fonder un port donnant sur les îles de la Baie Sombre, et, plus important encore, sur les territoires intérieurs des Orcs et des Gobelins. De par la position d’Ashgäar, au milieu des montagnes qui étaient alors parsemées de mines d’or et de pierres précieuses, les Orcs d’Ashgäar connurent alors leur apogée.

Seulement, une telle richesse aux côtés du Temple de Niue ne fit qu’augmenter le ressentiment de Niue envers les habitants d’Ashgäar, haine qui était déjà féroce puisque les Orcs, comme les autres hybrides issus des Primaires, étaient des créations des Dieux Élémentaires. Le Dieu ne pouvait tolérer une telle hérésie aux portes de son Temple, alors il commença à concevoir un stratagème audacieux pour s’en débarrasser. L’entité opposée à Quen possédait ainsi le pouvoir de changer de forme à volonté, et c’est ainsi qu’il quitta temporairement son Temple, sous une forme déguisée. Il alla ainsi rencontrer les Primaires, se faisant passer successivement pour Posicillon, Eolia, Vulfume et Fimine, afin d’attirer quelques-uns de chaque espèce dans le piège qu’il tendait.

Aux Démons Sirathiens, il laissa entendre qu’il leur offrirait plus de richesses qu’ils ne pouvaient en rêver, aux Dilths, il promit plus de puissance qu’il n’était possible d’en imaginer, aux Dolmants, il offra de régner à jamais sur les Terres des Éléments, aux Dragons, il fit don d’une résistance sans égale et aux Elfes de Lumière, il leur alloua une longévité exceptionnelle. Quant aux Ents, derniers des six Primaires, ils se virent présenter l’opportunité de diriger à jamais les nombreuses forêts du Monde. Si la grande majorité des Primaires refusèrent les offres pourtant très alléchantes de Niue, certains, parmi chaque race, succombèrent à la tentation et acceptèrent de rejoindre le Temple de Niue. Quand tous furent arrivés, le Dieu montra enfin sa vraie nature, et tous voulurent fuir, mais c’était déjà trop tard.

Niue n’ayant aucun respect pour les créations des quatre Élémentaires, il détruisit immédiatement tous les Primaires qui l’avaient accompagné, prenant le soin au passage de capturer l’essence si précieuse qui les animait tous. De ces essences multiples, il façonna, à l’insu de tous, une nouvelle race supérieure aux autres, n’obéissant à aucune autorité Élémentaire, seulement à la sienne. Et il se créa une armée de cette race, qu’il équipa des plus solides matériaux et sortilèges qui existaient alors. Des armes de siège furent inventées et préparée pour réduire en poussière les solides remparts d’Ashgäar.

Ce nouvel Ordre s’organisa, et il fut rédigé sur la Table de Pierre du Temple le Code Antique de Niue, transcrit en langue runique, dialecte utilisé dans le Temple. Ce Code permit l’organisation hiérarchique de cette nouvelle race créée par Niue : elle était maintenant régie par son Commandeur, lequel était conseillé par un Amiral, un Chancelier et un Inquisiteur, chacun possédant des qualités propres qui garantissaient une efficacité certaine sur tous les sujets traités par l’Ordre. Et quand cet Ordre supérieur à tout ce qui était connu fut prêt, Nuie lança enfin l’attaque contre la ville voisine, véritable insulte à sa condition.

Le Dieu avait prévu que la destruction de la ville serait terminée en un temps record. Il était sûr de sa supériorité, certain d’appliquer la vraie Volonté de l’Unique. Rien ne pouvait entraver sa glorieuse marche vers la destruction finale des Dieux Élémentaires. Seulement, dans sa divinité, Niue avait sous-estimé les Orcs d’Ashgäar, qui, forts de leurs richesses, avaient noué des liens très forts avec les Orcs de l’intérieur des terres. Ces derniers, quand ils apprirent la difficulté dans laquelle se trouvait Ashgäar, envoyèrent des armées comme personne n’en avait encore jamais vu en renfort. Ils creusèrent des tunnels reliant la ville aux mines aux alentours, s’en servant pour y apporter les vivres nécessaires à tenir un siège. La bataille lancée par Niue se transforma en guerre, à mesure que les jours, les ans puis les millénaires passèrent.

Malheureusement pour Ashgäar, la puissance du Dieu était infiniment supérieure à celle des Orcs, et sa conviction de faire valoir la Volonté de l’Unique était si profonde que pour chaque membre de son Ordre tombé au combat, il en refaçonnait dix. Et finalement, plus de cinq millénaires après le début de cette guerre qui semblait sans fin, Ashgäar tomba et les Orcs furent contraints de fuir vers l’intérieur des Terres. La cité fut rasée, seules quelques ruines furent laissées par l’Ordre comme témoignage de leur puissance. La menace à proximité de Nuie était maintenant apaisée, et il pouvait maintenant réfléchir au moyen d’abattre ses ennemis suivants, bien plus dangereux : les Dieux Élémentaires. L’Ordre ne fut pas dissous, et reçut la tâche de protéger le Temple, attendant les prochaines directives de Niue. Des millénaires plus tard, cet Ordre se ferait connaître au monde entier, sous le nom de Gardiens de l’Épouvante.

Chapitre Second : L'avènement des Gardiens

Ce n’est que quelques millénaires plus tard que l’Ordre des Sentinelles fit reparler de lui. La guerre d’Ashgäar était depuis longtemps tombée dans l’oubli, la mémoire collective étant en ces temps trop emplie de ce genre de destructions, et les ruines de la ville demeuraient désertes. Bien entendu, il y avait toujours, de temps à autres, un Orc courageux ou un Humain aventurier qui venait s’aventurer, à la recherche de trésors oubliés. Mais ils disparaissaient toujours sans laisser de trace. Au fil du temps, la rumeur prévint tous les êtres vivants que le nord de la Baie Sombre était un endroit maudit, où il ne faisait pas bon s’aventurer. Car les Sentinelles veillaient toujours jalousement sur les alentours du temple, la tradition se transmettant oralement, des aînés vers leurs descendants et ce pendant des temps infinis.

Mais il advint entre les années -90100 et -90000 ce qu’il convient de nommer le Schisme du Temple. Depuis quelques temps, déjà, une faction au sein des Sentinelles semblait lassée de sa fonction de surveillance du Temple. Certes, les premiers d’entre eux avaient été façonnés pour et par Niue, mais cette époque remontait à plus de quinze mille ans, et le Dieu n’avait pas réapparu aux yeux des Sentinelles depuis la fin d’Ashgäar, restant enfermé dans le Saint des Saints du Temple, à préparer ce qui serait sa marche victorieuse pour répandre la volonté de l’Unique. Aussi, à l’insu du monde extérieur, deux camps se formèrent : ceux qui s’estimaient oubliés par Niue et qui voulaient maintenant accomplir leurs propres desseins, et ceux qui restaient envers et contre tout fidèles à leur créateur et à leur mission originelle. Des tensions apparurent, les esprits s’échauffèrent et bien vite, le combat éclata dans le Temple et aux alentours.

Cette guerre fut particulièrement sanglante, car les deux factions étaient de forces égales. Aussi l’Ordre commença-t-il à sombrer dans l’épouvante, s’entredéchirant dans une bataille fratricide. Nombreuses furent les Sentinelles qui périrent durant cette période funeste, et quand soudain Niue sortit enfin du Saint des Saints, il arriva non seulement au milieu des affrontements, mais fut de plus forcé de constater que l’Ordre ne comptait plus qu’une vingtaine de membres tout au plus : les survivants à ce carnage, les plus puissants. Toutefois, la conscience des Sentinelles créées par Niue était si forte qu’elle ne pouvait être abattue de cette manière, et l’esprit des Sentinelles dont les corps avaient été détruits durant le Schisme était toujours vivant. Alors, Niue usa une nouvelle fois de ses pouvoirs divins, et fusionna les esprits sans corps avec les survivants, s’assurant que dans chaque corps se trouve une majorité d’esprits qui lui étaient resté fidèles au début du Schisme, s’assurant de la part des rescapés une servilité sans égale.

Les premiers temps, cette manipulation ô combien périlleuse montra des résultats plus que probants. Les Sentinelles, possédant maintenant de multiples consciences, étaient devenues plus sages, plus réfléchies et dotées d’un sens tactique fantastique, ainsi que de facultés de combat terribles. Déjà sans éléments, les survivants avaient beaucoup souffert du Schisme, et leur mélange avec les esprits des vaincus les rendait maintenant ni vivants, ni morts. De sombre créatures, à l’aise dans les deux mondes, habitués de la Nécropole qu’ils venaient hanter. Ils n’étaient plus que des esprits sous leurs capuchons, terriblement dangereux. Niue, quand il vit comment ses créations s’étaient développées, leur dévoila son stratagème, ainsi que ses ordres : il désirait détruire le maximum d’être vivants créés par les Hérétiques Élémentaires, espérant ainsi affaiblir suffisamment ces derniers pour les faire disparaître ensuite.

Si les Sentinelles reçurent ces nouveaux ordres avec plaisir –enfin, ils pouvaient de nouveau sortir du Temple pour se livrer à ce qu’ils savaient faire de mieux, la guerre -, la manipulation des consciences effectuée par Niue commença à montrer ses limites. En effet, si cela s’était révélé de prime bord un avantage, le fait que plusieurs esprits puissent commander un seul corps commença à rendre les membres de l’Ordre instables, bien plus fanatiques et terriblement violents. Certains, en plus du culte obligatoire qu’ils vouaient sans sourciller à Niue, commencèrent à louer les exploits contés de Nyx et Erèbe face aux Dieux Élémentaires. Progressivement, les Sentinelles abandonnèrent leur passé, et lorsqu’enfin Niue déclara qu’il était temps d’effectuer ses projets divins, l’Ordre avait profondément changé : de Sentinelles, ils étaient devenus des Gardiens de l’Épouvante, habitués aux sciences et magies occultes, se livrant à des expériences ignobles au cœur du Temple.

Chapitre Troisième : la Marche Funeste

Sortant pour la première fois depuis quinze mille longues années du Temple, les Gardiens firent alors l’étalage de toute la haine destructrice dont ils pouvaient être capables, eux les désormais serviteurs maudits de Niue. Les Gardiens exterminèrent pratiquement toutes les races qu’ils rencontraient, les associant sans peine dans leur fanatisme à l’hérésie des Dieux Élémentaires. Ainsi, dura pendant près d’un siècle ce qu’il convient de nommer la Marche Funeste des Gardiens. Une terrible période, oubliée pour la simple raison que rares furent les survivants de ce génocide destructeur, et que ceux-là furent tellement affectés qu’ils ne parlèrent jamais de ce qui s’était vraiment passé. Les Gardiens, munis de leur arme de siège terrifiante, surnommée la Dévoreuse, assiégèrent méthodiquement toutes les places fortes des races qui se trouvaient sur leur chemin. La population, en ces temps-là, était bien moins nombreuse que maintenant, et toutes eurent à subir de lourdes pertes.

Les Gardiens commencèrent par traverser les monts Vulfumius, débarquant en plein territoire Orc. Ils connaissaient cette race, depuis Ahsgäar, et n’eurent aucun mal à réduire en poussière la puissante cité de Mor’Frey, au pied des Montagnes Furieuses. Ils continuèrent ainsi vers le Nord, écrasant au passage les forgerons gobelins dans leurs cavernes, et traversèrent le pays des Elfes qu’ils ravagèrent de Lesmü vers Dünen. Chaque cité des Elfes fut trouvée, et soit incendiée, soit envahie par une espèce de maladie ignoble qui ne faisait que peu de survivants. Les Gardiens n’eurent aucun mal non plus à détruire les Hommes en descendant au Sud, ces Hommes qui s’étaient retranchés dans les mines au nord de leur territoire en apprenant la nouvelle de la destruction subie par les Elfes, abandonnant en cela toutes leurs possessions pour saisir la moindre chance de survie. Qu’importe, ils ne furent pas épargnés.

La cohésion entre les différentes races, en ces temps-là, étaient une pure utopie, car plus les Gardiens avançaient, plus ils devenaient puissants, et plus les éléments se battaient entre eux. Aussi, il fallut du temps avant que les premiers renseignements sur le mode opératoire des Gardiens ne soient communiqués. Et si ces rapports maudissaient à chaque fois la folie destructrice qui animait les serviteurs maudits de Niue, le pire était encore à venir. En effet, à chaque fois, ils ne laissaient que quatre survivants, qui étaient torturés sans fin jusqu’à ce qu’ils se transforment en une source intarissable d’informations. Ceux qui parlaient les premiers étaient libérés, atrocement mutilés, dans le but de transmettre l’effroi suscité par les Gardiens de l’Épouvante aux autres races, promettant que leur tour viendrait bientôt. Les plus coriaces, qui ne voulaient pas parler, était tués, après que Niue récupère leur essence pour renforcer toujours davantage les pouvoirs de ses Gardiens.

De ce fait, plus les Gardiens gagnaient de batailles, plus ils devenaient irrésistibles, se débarrassant des ennemis les plus impressionnants toujours plus facilement. Siktaar, qui était en ces temps l’un des plus féroces combattants de la Terre des Éléments, apprenant la nouvelle de cette armée étrange et peu connue marchant droit vers la demeure des siens, prépara les Dragons Sorciers à la bataille. Si Siktaar avait foi en leur force, il dépêcha certains de ses émissaires les plus rapides, afin de rallier à sa cause d’autres espèces, fussent-ils Primaires ou Hybrides, les suppliant d’oublier leurs querelles fratricides. Malheureusement aucun autre clan ne répondit à l’appel du Seigneur des Dragons Sorciers, si bien que ces derniers se préparèrent à lutter seul contre cette menace nouvelle. Le combat fit rage pendant plusieurs jours, et si les dragons-sorciers étaient bien plus nombreux, les Gardiens avaient l’avantage de contrôler des pouvoirs encore inconnus, si bien que la bataille pencha au fil des heures tantôt d’un côté, tantôt de l’autre.

Au bout de la 94ème heure de cette guerre, alors que l’issue n’en avait jamais été aussi incertaine, le Commandeur des Gardiens, aidé par son Amiral, réussirent à coincer Siktaar et à l’isoler des siens. Si le Commandeur aurait bien voulu récupérer l’essence du Seigneur des Dragons Sorciers pour augmenter encore la puissance des siens, l’Amiral lui conseilla d’en finir rapidement. Alors, ils tranchèrent tous les membres de Siktaar, le laissant sans aucune résistance, et chaque Gardien vint planter, à tour de rôle, une lame dans le corps agonisant de leur ennemi. Le supplice dura un peu moins d’une heure, mais sembla interminable pour le malheureux qui finit par s’éteindre. Aussitôt, les Dragons Sorciers parurent désorientés, si faibles sans leur chef qui leur servait de catalyseur pour leurs attaques magiques. Les Gardiens n’en firent qu’une bouchée, gardant là encore seulement quatre des Dragons Sorciers en vie, pour leurs funestes expériences.

La mort de Siktaar dégagea une énergie telle qu’elle fût ressentie par les Dieux Élémentaires eux-mêmes, leur faisant l’effet d’un coup de poignard glacé dans le cœur. Ils surent que quelque chose de terrible venait de se passer, et qu’il était de leur devoir, pendant qu’ils en avaient encore les pouvoirs, d’arrêter la marche macabre des Gardiens de l’Épouvante. Malheureusement pour les Terres des Éléments, les Dieux Élémentaires étaient en ces temps-là plus que jamais hostiles à l’idée d’une quelconque collaboration, restant sourds aux suppliques de Quen qui désirait plus que tout la fin de cette période de destruction. Aussi, tous essayèrent, à leur manière mais individuellement, d’arrêter la Marche Funeste. Jamais ils ne commirent pire folie que de tenter de combattre seuls les Gardiens de l’Épouvante, car ceux-ci avaient atteint à présent une puissance apocalyptique, contrôlée par Niue.

Alors que les Gardiens continuaient à annihiler toute création élémentaire avec un fanatisme sans pareil envers la volonté de Niue, ce fut Fimine qui, le premier, intervint en vue de les contrer. Il fit trembler le sol pendant plusieurs jours et plusieurs nuits, créant des séismes. Mais en vain, car les Gardiens semblèrent flotter au-dessus du sol, déjouant ainsi le pouvoir de la Terre. Une centaine d’années plus tard, Posicillon se présenta au-devant de la Marche Funeste des Gardiens, et fit déborder les mers et les océans, pendant un mois entier, pour tenter de les engloutir. Malheureusement, les Gardiens n’étaient pas plus vivants que morts, si bien qu’ils se passaient de respirer, déjouant ainsi le pouvoir de l’Eau. Vint ensuite IVulfume, qui invoqua des rivières de lave pour détruire par le feu l’engeance des Gardiens. Ces derniers virent ainsi leur corps brûler, mais leur âme intacte. Ils devinrent de ce fait invisibles sous leurs capuchons, déjouant le pouvoir du Feu. Eolia voulut, plusieurs siècles après l’échec de ses pairs, tenter sa chance. Elle fit s’élever des tempêtes et des tornades pendant une année entière, dans l’espoir de balayer à jamais les serviteurs de Niue. Les Gardiens se réfugièrent dans le monde des morts, déjouant ainsi le pouvoir de l’Air.

Du fait de tous leurs échecs, les Dieux Élémentaires s’étaient beaucoup affaiblis, tandis qu’ils n’avaient fait que renforcer les pouvoirs des Gardiens. Alors, les Quatre se retirèrent, assistant impuissant à l’hégémonie des Gardiens sur la Terre des Éléments, puisse que nul ne pouvait plus se dresser face à eux. Les années devinrent des siècles, et les siècles des millénaires, avant que les Quatre, brisant ainsi cette haine qui les opposait, ne se réunissent à nouveau, sous la demande de Quen. Ils élaborèrent ainsi un plan, afin de frapper en plein cœur des forces ennemies : le Temple. Le peu de ce qu’il restait d’êtres vivants se vit ainsi ordonner de marcher sur le quartier général des Gardiens de l’Épouvante. La grande majorité des vivants s’attendait à mourir, mais Quen intervint lors de la marche des forces des Quatre, si bien que les Gardiens ne purent rien tenter avant que l’armée des éléments réunis ne soit aux portes du temple.

Le siège dura plusieurs décennies, et les Gardiens faisaient mieux que se défendre, même si par l’intervention de Quen ils ne pouvaient sortir du Temple. Toutefois, la soif de revanche des Quatre, qui avaient pendant si longtemps assisté à la destruction de ce monde en restant totalement impuissants, ainsi que leur volonté de faire front commun face à l’ennemi, finit par perforer les lignes de défense du Temple, et l’Armée des Quatre se livra à un véritable carnage à l’intérieur. La plupart des Gardiens furent totalement anéantis, mais certains étaient devenus si puissants après les nombreuses destructions opérées qu’ils ne purent être tués. Les Dieux Élémentaires décidèrent alors de fragmenter les esprits et le corps de chaque membre du Conseil, consignant ces morceaux d’âmes dans des objets, inertes et animés, et ce pour l’éternité. Les plans machiavéliques de Niue étaient, pour l’instant, arrêtés.